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Différenciation Pédagogique : présentation

jeudi 1er février 2024, par Sébastien Bépoix

Suite aux formations "Différenciation Pédagogique en LHG" proposées au PAF en 2023/2024, voici un petit article - non exhaustif - qui rappelle ce qu’est (et n’est pas) la différenciation, quelle est sa plus-value et son intérêt. Un second article présentera plus en détail des modalités de mise en place.
Merci aux (remarquables) formateurs du groupe académique "Différenciation pédagogique" impliqués dans ces formations, et qui ont permis d’alimenter cet article par leur réflexion, leur expérience et leur passion : Mickaël Bertrand, Stéphane Clerc & Grégory Chovet.

«  Différencier, c’est organiser les interactions et les activités de sorte que chaque élève soit constamment ou du moins très souvent confronté aux situations didactiques les plus fécondes pour lui. » (Perrenoud, 1992).

Différencier, ce n’est pas individualiser ! Le témoignage de Patrick Marques, (initiateur du concept de cours-noyau sur lequel nous reviendrons dans un autre article) professeur agrégé d’histoire-géographie en lycée et coordonnateur du groupe de réflexion Cabotage dans l’académie de Rennes :

"si vous envoyez vos élèves en difficultés sur les pistes noires dès le début par ce que vous avez des ambitions très fortes pour vos meilleurs élèves, les plus faibles vont bloquer et n’apprendront rien. Inversement, en mettant tout le monde sur les pistes vertes, certains élèves vont réellement s’ennuyer. Une classe d’élève c’est une station de sport d’hiver, certains aiment les grandes descentes, d’autres dans les bosses, certains préfèrent descendre en skis, d’autres en surf. Certains ont besoin d’un moniteur, d’autres n’ont plus besoin d’étayage." (...) La différenciation ne consiste pas à prendre en compte tous les besoins spécifiques et individuels de chacun de nos élèves. C’est impossible ! L’explosion des demandes de personnalisation via par les Plans d’Accompagnement Personnalisé (PAP), Projet d’Accueil Individualisé (PAI) nous montre combien ce travail est trop lourd à mener seul dans le cadre de sa classe. Pour reprendre l’analogie avec la station de sport d’hiver, l’individualisation reviendrait à ouvrir et entretenir une piste de ski par élève…" (source : https://actu.nathan.fr/la-differenciation-le-retour-d-experiences-terrain)

Individualiser consisterait donc à renforcer les inégalités, sans compter la surcharge de travail pour l’enseignant... alors que différencier, c’est surtout diversifier des modalités (supports, activités...) de la tâche sans en modifier la complexité. Et personnaliser, ce n’est pas individualiser ! Une rapide explication par Sylvain Connac, enseignant-chercheur en sciences de l’éducation (Université paul Valéry de Montpellier) :

La collection Mythes et Réalités (Éditions Retz) propose des ouvrages qui décryptent "les idées reçues qui alimentent les débats en matière d’éducation". Par exemple, dans L’innovation pédagogique, André Tricot aborde les chapitres suivants qui permettent de comprendre la différenciation pédagogique (qui est une "innovation" pédagogique) et de l’illustrer : Faire manipuler permet de mieux faire apprendre, Les élèves apprennent mieux quand ils découvrent par eux-mêmes, Les élèves apprennent mieux en groupe, La pédagogie par projet donne du sens aux apprentissages, Il faut inverser la classe : les apports
notionnels à la maison, les applications en classe, Le numérique permet d’innover en pédagogie...

D’autres titres de cette collection peuvent alimenter la réflexion et donner des idées : Enseigner, ça s’apprend (Gérard Sensevy), Apprendre en jouant (Eric Sanchez et Margarida Romero)...

Mais que les ludo-sceptiques ou numéricophobes se rassurent : la différenciation ne passe pas nécessairement par le jeu (même si il est source de motivation...) et les modalités de mise en place de la différenciation ne passent pas nécessairement par le numérique (même si il apporte de nombreux avantages...). De plus, ce n’est pas parce les élèves sont entourés par du numérique qu’ils sont compétents avec l’outil ! Il peut donc aussi être un frein dans l’apprentissage... Si vous demandez à un élève de faire un diaporama à l’issue d’un travail de synthèse, vous pouvez le mettre en difficulté, car il n’a pas la compétence nécessaire.

Exemple d’une classe autonome avec très peu de numérique :

"J’innove donc je suis (les plâtres...)"

Outre la crainte d’une surcharge de travail (qui est finalement une façon différente de préparer...), l’enseignant craint également le fait de changer de posture et de perdre le contrôle...

Rappelons rapidement les postures d’enseignement définies par Dominique Bucheton : (https://neo.ens-lyon.fr/neo/formation/analyse/les-postures-enseignantes)

- Une posture de contrôle : elle vise à mettre en place un certain cadrage de la situation : par un pilotage serré de l’avancée des tâches, l’enseignant cherche à faire avancer tout le groupe en synchronie.

- Une posture d’accompagnement : le maître apporte, de manière latérale, une aide ponctuelle, en partie individuelle en partie collective, en fonction de l’avancée de la tâche et des obstacles à surmonter.

- Une posture de lâcher-prise : l’enseignant assigne aux élèves la responsabilité de leur travail et l’autorisation à expérimenter les chemins qu’ils choisissent.

- Une posture de sur-étayage ou contre-étayage : variante de la posture de contrôle, le maître pour avancer plus vite, si la nécessité s’impose, peut aller jusqu’à faire à la place de l’élève.

- Une posture d’enseignement : l’enseignant formule, structure les savoirs, les normes, en fait éventuellement la démonstration.

- Une posture dite du « magicien » : par des jeux, des gestes théâtraux, des récits frappants, l’enseignant capte momentanément l’attention des élèves.

Nous passons de l’une à l’autre, d’un cours à l’autre, ou lors d’une même séance. Mettre en place de la différenciation, c’est aussi accepter de lâcher prise (ce qui souvent est le plus dur). Et proposer des travaux de groupes, c’est aussi accepter un peu le bruit : travailler à plusieurs, c’est échanger.

Pour terminer, une expérience en vidéo qui engage une réflexion sur les conséquences de la pérennité des groupes, et sur l’importance des mots employés par l’enseignant : Dire qu’un exercice est "facile" n’entraine pas forcément une motivation chez tous les élèves : que pensera celui ou celle qui échouera à l’exercice que tout le monde a réussi ? C’est ce qu’on appelle le sentiment d’impuissance apprise.

Dans le prochain article (Différenciation Pédagogique : des modalités) seront abordés la classe puzzle, le cours noyau, la classe inversée, des exerciseurs numériques avec ou sans IA...

Pour aller plus loin :

https://www.cnesco.fr/differenciation-pedagogique/

 

file_download Conférence de consensus Ifé
file_download Eduscol : différenciation
file_download Les postures enseignantes


Voir en ligne : https://www.cnesco.fr/differenciati...